Il y a maintenant 10 jours que je n’ai pas écrit ici, les billets s’espacent mais ce n’est pas pour autant que j’ai arrêté d’écrire. Mes cahiers se remplissent d’encre violette … mon téléphone d’anecdotes saisies lors de mes sorties pour ne pas oublier de les reporter sur mon cahier de mémoires.
J’ai depuis le 1er janvier, déjà eu plusieurs réglages avec ma régleuse de l’hôpital. Pourquoi autant vous me direz ? Régler 44 électrodes en 1h30 relève de l’effort supplémentaire. J’essaie à chaque réglage d’arriver « reposée » pour cet effort qui doit être continu. J’ai trouvé mon rythme en faisant une pause de 5 à 10 minutes entre chaque oreille. Cela me permet d’aller tester la première oreille dehors avant de faire la seconde. C’est certes du temps supplémentaire, mais je crois nécessaire. J’ai toujours un temps de 15 minutes pour m’habituer aux nouveaux réglages pour savoir si ça va le faire ou pas. Le souci étant que le bruit en milieu hospitalier est tellement différent de ce qu’on peut vivre dans la vie de tous les jours d’autant plus que je suis assez sensible aux variations sonores (pour pas faire comme tout le monde). Le choc sonore à chaque fois, mais je progresse toujours. Pas assez vite à mon goût mais visiblement je progresse bien 🙂
Au début des réglages, j’arrachais les implants cochléaires quand on les activait une fois qu’on avait fait le calibrage, ce qui n’est désormais plus le cas. Je les garde aux oreilles même si cela reste fort et pas « confortable »
Les séances d’orthophonie se font 2 fois par semaine, je vous laisse faire le calcul des séances qui se sont déjà déroulées, j’ai une séance tous les 15 jours avec une autre orthophoniste du même cabinet tous les 15 jours et c’est plutôt bien, ça varie les exercices et les voix. Elles sont essentielles à la réeducation sonore avec les implants cochléaires. J’y reviendrai sur les séances.
Quant à la découverte des bruits, comment dire, chaque jour est différent, chaque son est différent à chaque nouveau réglage qui lui permet d’affiner les sons plus précisément, plus nettement.
Comment peut-on avoir des résultats plus précis à chaque fois ? Parce que les neurones du cerveau ont une plasticité plus ou moins malléable selon les personnes sourdes qui ont eu une audition stimulée depuis la naissance avec des appareils auditifs (une oreille qui n’a jamais entendu, je n’ai pas d’avis dessus). Les neurones ne meurent pas, elles se reconnectent différemment, elles permettent d’analyser et d’associer le son au visuel quand c’est possible.
Ces deux derniers mois, c’était vraiment nouveau son = nouveau visuel. Réapprendre à entendre. Par contre, la gestion de la fatigue sonore et mentale, c’est pas évident. Il faut que j’apprenne à faire des pauses, à dire stop, à savoir quand il faut que je m’arrête. La majeure partie de ma journée est quand même encore bien plus dans le calme que dans le bruit.
Quelques petits bonheurs à partager avec vous tout de même… les explications c’est bien mais si vous avez des questions n’hésitez pas, j’y répondrai avec grand plaisir.
Je commence à reconnaître le nom des stations de RER et de métro et leur sonnerie. Le bruit des roulettes des valises qui claquent sur les pavés parisiens ou dans le métro, quel bruit insupportable.
Le week-end dernier, j’ai fait un gâteau au chocolat. Ça faisait longtemps que ça ne m’était pas arrivé, depuis l’opération en fait. Le bip-bip du thermomix quand il a fini de travailler, je l’entends désormais alors qu’avant c’était impossible. Mélanger les ingrédients, ce son de mélange des matières différentes entre la farine, le sucre, le beurre, quel bruit bizarre …
Le cinéma, ça vaut un billet à lui tout seul. J’ai été voir plusieurs films. Si je devais le résumer en un seul mot : ça te prend aux tripes (d’accord c’est 5 mots !).
La télévision, la musique, sont aussi des sujets qui valent des billets à eux seuls. Alors qu’on m’avait dit que la musique, je pouvais clairement l’oublier … visiblement, j’arrive à l’entendre et parfois c’est surprenant comme résultat. On y reviendra en temps voulu.
Savoir que mes fenêtres aux doubles vitrages n’isolent pas autant que cela, j’ai découvert que j’entendais les voitures passer dans la rue, les cris et les éclats de voix des adolescents qui rentrent du collège, ou encore le camion des poubelles qui passe et qui recule dans l’impasse avec son bip-bip sonore … J’étais déçue de savoir que mes fenêtres n’isolaient pas comme je le pensais. Quelle naïveté ! 🙂
Les bruits, je peux pas tous les lister, mais je vais en lister certains dans le domaine de la cuisine.
Quand j’allume le gaz, j’entends le son du gaz qui arrive dans le tuyau et qui s’enflamme grâce à cette petite étincelle. C’est impressionnant, je trouve d’entendre cette puissance qui propulse le gaz dans tes tuyaux de cuisine.
Ce soir j’ai entendu l’eau bouillir, les œufs qui cognent la casserole sous le mouvement des bulles de chaleur … Quelle surprise !
L’eau qui coule dans le lavabo que je sois dans la pièce ou pas, je reconnais le son aisément maintenant.
Le bruit de la vaisselle qui s’entrechoque, c’est quelque chose que je ne peux pas supporter. Soit je le fais et je les enlève, soit je le fais en n’enlevant pas les processeurs mais j’y vais tellement lentement que ca fait pas de bruit, mais je prends mon temps !
Ce soir, j’ai entendu mon mari se faire à manger, ouvrir les portes des placards, le bruit de la vaisselle, je trouvais qu’il y avait tellement de bruit que je me suis levée pour aller vérifier … Tout ça pour un sandwich !
Par contre, la fatigue, la soif et le goût ils restent encore compliqués à gérer au quotidien mais je ne désespère pas !
La fatigue dès que je fournis un effort de compréhension, d’écoute, je suis obligée de dormir un moment après pour pouvoir supporter le reste des sons que j’entends jusqu’au soir. Je suis achevée malgré ma concentration, mes efforts pour continuer à tenir debout, mais mon corps me dit stop.
Ces derniers temps, je suis plutôt sensible aux différents bruits qui m’entourent, est-ce signe que mon cerveau les a enfin intégré ou il est arrivé à saturation ? Je ne sais pas mais pour compenser je dors, et je dors profondément, tellement profondément que je ne me rappelle pas d’avoir rêvé.
La soif, je vis avec un pichet d’eau à la main, l’avantage c’est que mes reins sont propres ! Toujours voir le verre à moitié plein 🙂
Quant au goût, je dirais que la petite marmotte qui emballe le chocolat dans du papier alu, ben elle m’a filé sa boulette de papier alu. J’ai l’impression d’avoir mâché du papier alu au lieu d’avoir mangé du chocolat …
Heureusement qu’il me reste le crochet, les copines plus que fidèles au poste et les chamallows pour les moments difficiles qui malheureusement ponctuent ces périodes de découverte joyeuse. (Haribo, si tu sais pas à qui en envoyer, je prends tout le stock !)
Je me dis qu’il faut que je reste plus régulière dans la publication des billets, à quel moment vous préférez vous ? À vos commentaires ! 🙂
Hello Sophie , j’ai peut être raté un épisode : pourquoi le goût ?
Super question, je pensais en avoir déjà parlé … je fais un billet pour jeudi ! merci pour ton message !
j’avais la même question !
Je vais y répondre ! 🙂
Je te vois bien en Sherlock Holmes! Et puis tu pourras mettre du double vitrage chez toi 😀 en tout cas j’adore ton petit bilan, continue comme ça!
Mes fenêtres ont toutes du double vitrage, c’est même plutôt bien isolé
Sherlock Holmes, faut voir c’est une idée
Merci de nous permettre de suivre ça !
C’est une sacré épopée que tu traverses là, et me souvenir des sons que tu évoques me rappelle qu’au quotidien je les vis de la même façon que toi 🙂
Bon courage et encore merci <3
Et moi je souris béatement parce que j’ai presque les mêmes ressentis que toi. Merci pour ton p’tit mot ! <3
Pour relativiser les fenêtre à double vitrage : laisse-les ouvertes, la différence te fera apprécier leurs qualités !
Est-ce que tu arrives à identifier les « gens bruyants » (plus que d’autres) ? Ou pour le moment c’est plutôt un effet : les gens génèrent une telle somme de bruit(s) ?
Bon courage 🙂
Je devrais vite relativiser aux beaux jours, mais je commence déjà à relativiser c’est jusque je crois que j’étais trop naïve jusqu’à présent en ce qui concerne le bruit 😉
merci pour ton petit message !
Mince que ce souci de goût perdure encore jusque là. Tu m’épates à aller au cinéma, je n’y suis pas allée depuis des années et n’oserai pas tenter !
22ème séance d’orthophonie pour moi ce matin. Et le chemin reste encore long.
C’est chiant ce goût, le cinéma ben … faut bien tout tester ! 🙂
19e séance pour moi aujourd’hui 😉
Ah oui, les nouveaux bruits…
Je disais à tout le monde que mon jardin était assez silencieux malgré l’autoroute toute proche, dans mon ancienne vie.
Quand j’ai été appareillé la première fois je me suis exclamé : « Hé mais, c’est toujours aussi bruyant ? » Et en fait oui, je n’avais en fait jamais entendu le *vrai* bruit de fond.
On a l’air malin après hein … 😉
C’est toujours un plaisir de lire tes récits d’éveil à la vie sonore.
Chacune de tes découvertes de bruits auxquels les « entendants » ne prêtent pas attention.
Il est vrai que, quand on y prête attention, le bruit de la ville (grande ville, hein) est très agressifs. Dire qu’après, on se demande pourquoi les gens font la gueule… Mais rien que la foule, l’état de certains lieux… « ajoutez à ça le bruit et l’odeur » 😀
Pour les bruits que tu trouves agaçants (vaisselle, etc…), j’ai la « chance » de très bien entendre, surtout dans les fréquence hautes (dont les ultrasons). Les assiettes qui s’entrechoquent (juste en les portant), les couverts au contact de l’assiette, sont des sons qui m’agressent (douleur identique à une bonne claque).
Les chargeurs (téléphone, ordinateurs) sur lesquels aucun appareil n’est branché sont également pénibles. Certains émettent un très léger sifflement aigu (« ziiiiiiiiii »), que j’arrive à percevoir à l’autre bout de la maison 😀
Tout ça pour dire que je comprends, un peu, ce que tu peux ressentir.
Bon courage dans ton adaptation. Je suis sûr, en te lisant, que tes progrès sont énormes depuis le début de ton appareillage 🙂
Quel plaisir de te lire ma Sophie!!! et que de progrès! (même si quelques fois c’est dur) et puis si tu veux du calme et le bruit de la nature, je t’emmène chez mes beaux-parents (chiens, ânesse, juments, poules, canard oies, tracteur… mince j’ai du du calme!!) et une vingtaine de voitures qui passent par jour dans le coin 😉
T’es chou !
Merci pour ce partage!
Des fois, on ne se rend pas compte de la chance qu’on a de pouvoir entendre!
J’aime quand tu énumères ces sons, qui me paraissent si anodins… je me rends alors compte de la chance que j’ai, de pouvoir les entendre!
J’aime quand tu exprimes ta surprise, tes émotions en découvrant un son!
Sophie, tu m’inspires par ta force, ta folle envie de te sentir vivante! Pour tout ca, je te remercie profondément 🙂
Gros bisous et big hug
Que dire ?
Hello Sophie,
en matière de sons et en parlant de Chamallows, tu devrais refaire la pub en bourrant ta bouche ou celle de ton homme de ces friandises – au point de « ne plus pouvoir parler » – et d’essayer d’entendre et de comprendre ce que vous dites 🙂
Autre chose serait de les faire griller et de les introduire dans ta bouche (sans se brûler) et d’écouter ce que ça fait.
Bisous du Web