Entre deux rendez-vous, je me suis assise dans un café. Seule à une table. J’entends mes voisines de table parler mais je ne les comprends pas. Il y a un bouhaha énorme. J’ai entendu le claquement des mains qui se tapent. J’essaie de tendre l’oreille sans les regarder, c’est peine perdue.
Je tourne discrètement la tête. Je vois sur leurs lèvres qu’elles ne parlent pas français mais anglais ou américain. L’une d’elles a dit « fifteen ».
Je vais pas détailler davantage la scène, ce sont des événements du quotidien.
La lecture labiale est quand même ma meilleure amie, elle me sauve à chaque fois. Mes implants cochléaires sont complémentaires. Je me rends compte que j’en ai besoin pour communiquer plus aisément.
Ces derniers temps, je supporte très difficilement les bruits. Ca me fatigue. J’ai l’impression que tout le monde parle fort, mais non. C’est ma sensibilité qui a été remontée lors du dernier réglage car elle était plus basse que la normale. Je perçois davantage de détails.
Dimanche dernier, j’ai pris un vêtement qui était sur la chaise de la salle à manger. J’ai entendu un bruit sec que je ne connaissais pas. C’était ma pièce qui était tombée par terre. J’ai été surprise du son que cela pouvait générer. Entendre une pièce tomber, ça ne m’était jamais arrivé encore.
En fin de journée, j’aime m’asseoir dans le jardin pour écouter les chants d’oiseaux. L’heure avant le coucher du soleil, les oiseaux pépient davantage. On entend bien la différence quand le soleil est couché, la ville est plongée dans les bruits urbains.
Il y a peu, j’ai entendu le battement d’ailes d’une tourterelle. C’était assez drôle et bizarre à la fois, à entendre. Première fois aussi.
Je n’entends pas les battements d’ailes de papillons mais je me plaîs à les regarder devant ma fenêtre de bureau. C’est léger, furtif comme le son en quelque sorte.
Je me rends compte que mon cerveau n’a pas été habitué à entendre autant de sons, autant de détails qu’il m’est encore nécessaire de faire des pauses de sommeil dans la journée pour mieux encaisser.
Lâcher prise, ne rien faire, se forcer à ne plus analyser les bruits que j’entends depuis 7 mois. S’autoriser à se laisser aller, c’est pas simple quand le cerveau ou plutôt l’ouïe est tout le temps sollicitée. C’est l’objectif prochain.
Courage ma Sophie ! c’est tellement beau et nouveau ce que tu entends, je crois que nous, entendants, nous ne faisons pas assez attention aux bruits qui nous entourent…. dommage….. Je vais essayer « d’écouter « … écouter le silence,écouter la pluie, écouter le vent ……. écouter les oiseaux, çà il y a en a beaucoup » dans le petit bois derrière chez moi » et tra la la la lère et tra la la la la….
je te » claque » une bonne grosse bise sur la joue gauche, côté du coeur !….
Toutes ces premières fois sont si touchantes. J’espère que l’équilibre arrivera le plus vite possible. En attendant, merci de partager tout ça.
Je n’entends pas non plus les battements d’ailes des papillons, je me demande d’ailleurs si l’oreille humaine peut les entendre?